Le Test and Learn en pratique

Méthode visant à éprouver une idée ou un processus à petite échelle

Entre 60 et 85% des métiers de 2030 n’existeraient pas encore. Alors comment se prononcer à 17/18 ans via une plate-forme Internet sur ses choix d’orientation ? Car le temps que le jeune finisse ses études, de nouveaux jobs auront vu le jour et ceux pour lesquels il se sera formé auront peut-être disparus !

Les entreprises de demain doivent aussi, pour rester compétitives, développer les compétences digitales de leurs collaborateurs. Selon le cabinet Mc Kinsey, aux Etats-Unis, le coût annuel de l’incompétence bureautique est évalué, pour une entreprise de 1000 salariés, à 10 millions de dollars. On parle de 44 minutes perdues en productivité par jour et par salarié.

Ces 2 points suffisent à eux-seuls à justifier l’importance de se former tout au long de sa vie, d’essayer des choses, de se tromper, de recommencer. C’est un vrai changement culturel car il s’agit de passer d’une culture “Command and Control” à une véritable culture du “Test and Learn” ou encore de passer du “je maîtrise” au “j’expérimente”.

Qu’est-ce que le “Test and Learn” exactement ?

Avant tout, il s’agit de lâcher le rêve de la perfection ! De favoriser l’expérimentation, les essais, les erreurs et les ajustements perpétuels et cela en le vivant sereinement sur la durée. On n’attend plus que le projet ou le prototype soit parfait ; on fait une première version puis avec les retours des collaborateurs et des clients on améliore la version suivante. “On s’habille en marchant, voire en courant” comme nous le prônons auprès de nos clients. Le monde de la téléphonie, des jeux vidéo ou des applications ont intégré cela depuis longtemps, plus personne ne s’étonne d’avoir des mises à jour à télécharger pour régler les bugs remontés. 

Dans la même logique, l’excellence client c’est l’inverse de la culture de l’excellence.

Et puis, il faut arrêter cette manie de vouloir toujours expliquer les choses, de toujours intellectualiser ;
l’intuition arrive à force d’expérimentations ! Pour illustration, nous utilisons souvent en séminaire un jeu de cartes qui permet de voir comment une équipe fonctionne, comment elle communique pour atteindre la performance (C’est un jeu de rapidité en plusieurs manches avec des temps laissés aux équipes pour qu’elles améliorent leur score). Dans la majorité des cas, les groupes utilisent ces quelques minutes à discuter, à parlementer mais pas à s’entrainer pour valider leur théorie ! 

L’école 42 montée par Xavier Niel est basée sur un principe simple : “apprendre en faisant”. Et ça marche.

La valeur ajoutée “humaine” est là, d’autant plus que nous avons de la concurrence avec l’intelligence artificielle qui envahit peu à peu notre environnement.

La concurrence de l’intelligence artificielle est-elle sérieuse ?

Des tâches auparavant confiées à l’être humain sont attribuées aujourd’hui à des robots. C’est une vraie révolution qui est en marche. Le candidat à la présidentielle Benoit Hamon parlait de taxer les robots. Beaucoup se sont moqués de lui. En tous cas il avait intégré le fait que ça allait changer le rapport au travail.

Par exemple, dans le domaine des assurances, alors qu’il fallait environ 58 minutes à un être humain pour gérer un dossier, il suffit de 7 secondes à une intelligence artificielle pour y arriver ! Le robot peut régler des situations “complexes” et aussi remplir des tâches en interaction avec des êtres humains.

Le manager va devoir apprendre aux collaborateurs à partager l’espace avec les robots et à ne pas les voir que comme des “voleurs de leur travail”. On peut même apprendre du comportement des machines. Toute la question va tourner autour de la plus-value du collaborateur par rapport à elles. Et dans ce domaine, tout est encore à inventer. Beaucoup d’inquiétudes vont accompagner ce changement de paradigme qui a déjà commencé. Les salariés vont devoir être accompagnés, et formés à de nouvelles missions.

Aller bien au-delà du droit à l’erreur !

Ce qui est intéressant, c’est plutôt le devoir de prendre des risques, et pour cela d’accepter l’échec et de réussir à rebondir. Cette façon de voir cela comme un processus itératif et normal est encore à développer. 

En France ; c’est un concept difficile à intégrer pour deux raisons principales : le manager doit être parfait, tout savoir et nous sommes encore dans une culture du “c’est sous contrôle et je gère la situation”. D’ailleurs en France, vous créez une entreprise, vous essuyez un échec ; vous êtes automatiquement catalogué dans les perdants. Dans d’autres pays, on vous dit que c’est une bonne expérience et que vous allez capitaliser sur ce qui s’est passé pour réussir la seconde fois… Il y a toujours un apprentissage à en retirer. Autre continent, autre mentalité et une vraie capacité à faire un retour d’expériences pour s’améliorer et rebondir. On peut parler de résilience.

Halte à l’Ego !

L’égo rentre souvent en compte. En effet, quelle arrogance que de croire qu’on ne se trompe jamais, que la première expérience sera forcément la bonne !

Il vaut mieux se lancer, commettre des erreurs que d’attendre que ce soit parfait ; il s’agit de passer à l’amélioration continue en mode agile. Et concrètement de mettre en place un système IT et humain capable d’améliorer cette expérience en continu. C’est possible aujourd’hui avec des dispositifs de data mais s’il n’y a pas un ADN de remise en cause dans l’entreprise, toutes les données remontées ne changeront rien. Les équipes doivent prendre plaisir à consulter la data et à en déduire des améliorations pragmatiques. 

Il vaut mieux analyser peu mais bien et choisir les quelques bons indicateurs/KPI qui vont permettre à chaque collaborateur de prendre rapidement les bonnes décisions en toute autonomie. Cela évite que la hiérarchie crée de la distorsion d’information en se perdant dans les méandres des jeux de pouvoir ou de la politique d’entreprise. C’est ce qui est mis en place chez Zappos, souvent cité comme référence du management 3.0. 

Isaac Getz précise quant à lui, dans son livre “l’entreprise libérée” que “80% des innovations proviennent de niveaux hiérarchiques placées trois niveaux en dessous de la Direction Générale”. 

L’Ego pousse aussi parfois si à ne pas savoir s’arrêter dans l’erreur. Dans la Silicon Valley, on parle de “fail harder” pour dire qu’il vaut mieux échouer plus vite, plus fort pour pouvoir passer à autre chose. Ne pas persister inutilement pour conserver la face.

Des oppositions naissent les meilleures pratiques

Deux mots dont les sens s’opposent peuvent déboucher sur une pratique managériale efficace. Par exemple Cadre et Liberté. En effet, fixer un cadre est un bon moyen pour libérer les énergies et faire en sorte que les collaborateurs “osent” prendre des risques et essaient des choses de façon expérimentale. Le cadre est protecteur, donne les limites, fixe les droits et les devoirs – celui de se tromper par exemple – et permet à la liberté, à la créativité de s’exprimer. On passe alors dans la dimension du leadership partagé, de la transparence.

Walter White est professeur de chimie dans un lycée, quand il apprend qu’il est en phase terminale d’un cancer, il décide pour mettre sa famille à l’abri de monter un laboratoire de méthamphétamine avec l’aide d’un ancien élève devenu depuis trafiquant. Cette série américaine propose un exemple de création de start-up, le héros identifie un besoin sur le marché et organise un business pour y répondre, il étudie le marketing client, ses concurrents, s’entoure d’une équipe ad hoc, il n’hésite pas à faire des itérations avec le marché pour s’améliorer et s’adapter… Voici une autre vision de l’entreprenariat. Un bel exemple d’agilité à ne pas suivre dans son ensemble.

Breaking Bad créé par Vince Gilligan

Cet article est un extrait de notre Livre blanc :
10 idées sur le management inspirées par les jeunes (Nouveauté 2018)