Pourquoi continuer à voir le conflit et l’échec comme des problèmes ? Dans les organisations, le plus souvent les conflits font peur et les échecs changent le regard sur la personne concernée. Ils sont souvent associés à quelque chose de profondément négatif et synonymes de blocages, de tensions, de risques, de mises en retrait. Ils peuvent même aboutir à des arrêts de travail ou à un burn-out ! Pourtant, ils sont inévitables et font partie de la vie professionnelle comme les réussites, les victoires, les avancées, les parts de marché gagnées.
C’est comme une pièce à double face ou un recto et verso. Vouloir les éviter à tout prix, c’est courir après une illusion et se créer de la frustration inutile. Dans les faits, c’est totalement irréaliste et bien présomptueux !
Un manager ou un dirigeant efficace ne cherche pas à les éliminer : il apprend à les transformer en leviers de progression et de performance. Il est conscient que cela peut renforcer la motivation des collaborateurs si le rebond est bien traité. Cela fait écho à la citation attribuée au stoïcien Sénèque qui postule que « la vie, ce n’est pas attendre que l’orage passe, c’est apprendre à danser sous la pluie ! »
Et si nous changions de regard sur ces situations délicates et perçues négativement par la société dans son ensemble ? C’est en les comprenant et en les apprivoisant qu’elles deviennent de véritables opportunités. Pour la stratégie d’entreprise, pour le manager, le collaborateur et même pour le client final. On a tout et tous à y gagner !
Échec et conflit ne sont pas des anomalies, des erreurs de parcours. Ils sont des passages naturels et obligés que ce soit à titre individuel et dans toute dynamique collective. Bref ; c’est normal ! D’autant plus quand la période oblige à être de plus en plus dans une démarche de « Test and Learn » et que l’erreur, le réajustement, la correction sont censés devenir la nouvelle normalité.
Cependant, mal gérés, les échecs et les conflits génèrent frustration, retrait et démotivation des personnes de l’écosystème. Alors que bien appréhendés, ils favorisent clarté, innovation et engagement. Le manager, le collègue, la famille ont donc un rôle clé à jouer dans le « mindset » de chacun face à la difficulté…
Concrètement, les postures, les mots employés face à un conflit ou un échec vont conforter l’autre dans sa croyance limitante que la situation est impensable et inenvisageable ou au contraire l’aider dans sa prise de conscience que c’est juste une étape pour le dépasser et aller vers la réussite…
Evidemment des phrases comme « tu n’as pas le droit à l’erreur, tu es nul, c’est intolérable, je savais que tu n’allais pas y arriver » sont à bannir ! (Lire notre article sur le droit à l’erreur, source de performance)
Changer de regard est donc la première étape. Avoir une bonne estime de soi est essentiel pour accepter échec et conflit ; cela s’apprend et peut se développer. Il ne s’agit pas de basculer dans la position haute, l’arrogance, ne pas se remettre en cause mais de prendre sa juste part de responsabilité et ni plus ni moins.
L’échec n’est pas un verdict définitif, une fin en soi. C’est une étape d’apprentissage, un pas vers la réussite. Le conflit n’est pas une trahison, un affrontement violent de personnes, c’est l’expression de besoins ou d’intérêts qui cherchent à s’aligner. Et au-delà de l’échec et du conflit, la confrontation de points de vue est une richesse incroyable pour avoir plus d’idées, pour se démarquer de la concurrence, pour être meilleur collectivement et plus innovant.
Finalement, un manager ou dirigeant performants considèrent les tensions, les conflits et les échecs non comme des dangers à gérer ou des feux à éteindre, mais comme des signaux précieux à écouter et qui vont aider l’organisation à grandir.
Avant un conflit à proprement parlé, il y a toujours une situation qui « dégénère » peu à peu. Le conflit suit souvent un processus en 5 étapes :
À chaque étape, une action managériale et/ou de communication est possible pour prévenir l’escalade, permettre de prendre du recul et voir du positif dans ce qui se passe.
Les émotions jouent un rôle central dans la montée du conflit. Les incompréhensions, interprétations, jugements précipités nourrissent le conflit. La colère, la peur par exemple phagocytent la pensée et contribuent à faire dégénérer la situation. Pour canaliser ce débordement émotionnel, l’assertivité est un excellent levier de communication pour éclaircir les propos de part et d’autre. Il est nécessaire d’avoir une prise de parole à la fois authentique et respectueuse. La bonne nouvelle : ça s’apprend ! Les émotions jouent aussi un rôle dans la façon de gérer un échec et de rebondir ; la peur des conséquences peut ainsi induire un repli sur soi et empêcher d’apprendre de la situation.
L’égo, lorsqu’on a une mauvaise estime de soi, peut également s’en mêler et il fait souvent beaucoup de dégâts. La position haute qui en découle, une forme « d’arrogance » perçue crispe encore plus et chacun campe sur ses positions plus longuement et plus durement. Le résultat est que la situation empire si elle n’est pas cadrée, et que l’apprentissage ne s’opère pas.
Pour se débloquer, chacun doit s’approprier personnellement les bénéfices cachés du conflit et de l’échec car bien gérés, ils deviennent de puissants accélérateurs. Ils permettent de clarifier les non-dits, de favoriser l’écoute active, de faire émerger des solutions innovantes par la co-construction. Au niveau humain, cela renforce la culture de l’amélioration continue et renforce un leadership plus humain et plus humble. Et c’est souvent après une situation difficile traversée ensemble, qu’une équipe voit ses liens se renforcer.
Le conflit, l’échecs ne sont pas une sanction. C’est une invitation à mieux comprendre et à mieux coopérer.
Il y a 3 leviers essentiels pour un manager pour bien réagir face à un conflit :
Le manager a tout intérêt, à titre préventif, de poser un cadre protecteur : l’équipe définit ensemble les règles du jeu. On peut organiser des « météos » des fiertés et des irritants pour faire émerger ce qui va et ce qui dysfonctionne. Le fait de tenir des réunions de régulation régulières désamorcent aussi les situations délicates. Plus on pratique les feedbacks croisés entre les membres de l’équipe, plus la situation sera apaisée. Il est essentiel aussi que les rôles et missions de chacun soient clairs car, dans le cas contraire, c’est un facteur d’agacement.
En plein moment de tension, il s’agit d’accueillir l’émotion sans juger et si besoin il peut être utile de rappeler les règles du jeu posées ensemble. En tous cas, il faut éviter de tomber dans le triangle dramatique de Karpman et plus précisément dans une des 3 postures que sont le Sauveur, la Victime ou encore le Persécuteur.
Il est essentiel de changer de posture à certains moments. Par exemple, face à une difficulté d’un collaborateur, un manager peut être tenté d’être dans la posture de Sauveur et de « faire à sa place ». Almors qu’il serait plus utile dans cette situation de passer à la posture de Coach pour être « aidant » sans se substituer au collaborateur. De la même façon, si un collaborateur se place en posture de Victime, le manager doit l’aider à passer à celle de Responsable d’une partie au moins de la situation.
Enfin, face à une posture de Persécuteur d’un collaborateur, le manager peut lui dire que ses idées sont les bienvenues mais qu’être « Confrontant » est plus intéressant que de tomber dans l’attaque pour bénéficier d’un riche débat d’idées.
Après le conflit, il faut réussir à transformer l’échec ou la tension en apprentissage en organisant par exemple un retour d’expérience collaboratif, en s’appuyant sur l’approche des 4C : que faut-il Continuer, Corriger, Cesser, Commencer à la suite cette situation ? Il est important, quelle que soit la situation, de valoriser les progrès, même minimes et de positiver l’échec et les difficultés sans les banaliser.
Au niveau de la posture, à chaque instant, le manager a un choix à faire et plus particulièrement en situation de forte émotion. Est-ce que je choisis de :
La clé pour réussir est d’apprendre à reconnaître ce qui nous fait « basculer » en zone rouge : certaines situations, certains profils de personnes, certains sujets, certains types d’échecs. Cette lucidité permet d’anticiper ses réactions, de réagir plus sereinement et de réussir à se maitriser davantage. Le manager peut également « former » ses collaborateurs à ces différents outils pour aider l’équipe à grandir et à mieux gérer les crises !
Les conflits et échecs sont des révélateurs puissants. À condition de rester focalisé sur la solution à trouver, non sur la faute ou la recherche d’un coupable. Chaque tension est une occasion de mieux se connaître, d’innover, de renforcer la cohésion de l’équipe. C’est dans des occasions comme celles-ci, face à l’adversité, qu’un collectif peut vraiment se souder davantage.
La posture de manager « transformateur » repose sur 3 piliers :
En synthèse, la prochaine fois qu’un conflit surgit ou qu’un échec vous bouscule, ne cherchez pas à l’éviter. En revanche, recherchez ce qu’il révèle, ce qu’il propose, ce qu’il offre derrière l’inévitable lot de difficultés. Ayez à l’esprit que le conflit bien géré est un accélérateur de performance et d’évolution, l’échec bien accueilli un tremplin pour le collectif.
Rappel pratique : On ne peut pas changer sa personnalité. Mais on peut toujours ajuster ses comportements !
Alors, quel conflit, quel échec récent pourriez-vous transformer en opportunité dès aujourd’hui ?